La décentralisation technologique affole la valeur des actifs: la règle d'Hollywood (#9)
Que se passe-t-il quand la règle d'Hollywood, celle de l'IA, impose son yoyo à la valeur des actifs ? 1. Crises industrielles 2. Une valeur sublime pour l'architecte, le cinéaste, et... ?
Et si la règle d’Hollywood s’imposait au monde et à ses actifs ?
J’aime William Goldman, ce scénariste virtuose qui a connu un parcours en montagnes russes. Il a collectionné les Oscars, mais aussi les échecs cuisants. Jeune garçon, j’ai vibré devant son “Butch Cassidy et le Kid” (1969). Plus tard, son scénario haletant des “Hommes du président” m’a fait découvrir le scandale du Watergate, celui qui fit passer le Président Nixon du pouvoir suprême aux oubliettes de l’histoire.

On peut dire que Goldman, ce funambule du scénario, ne craint pas le vertige: il a signé “Marathon Man” et aussi “Princess Bride”, son œuvre pivot sur les coulisses du jeu d’Hollywood dont il est un expert. Dans ses mémoires devenues célèbres “Les Aventures d'un scénariste à Hollywood”, et devant les caméras du monde, Goldman prophétise quelle sera la règle d’Hollywood et du showbiz, celle de l’imprévisibilité totale de la valeur d’un film:
“Pas une seule personne dans l’univers du cinéma ne saura jamais de façon certaine ce qui va marcher ou non: Nobody Knows Anything".
D’où cette question un brin complexe à laquelle je tente de répondre aujourd’hui avec ma recherche. J’étudie la “loi de puissance créative de l’homme”, celle qui a traversé l’histoire culturelle du langage et de l’humanité à 3 âges (1. Sapiens, 2. Gutenberg, 3. IA):
Que se passe-t-il de 2025 à 2035 quand la règle du showbiz, celle de 3 générations d’outils d’IA, s’impose au monde ? Quand l’actif intangible de l’IA pénètre au cœur de l’actif tangible (ex: la voiture, la ville, l’immobilier,…) ? 1. Préparez-vous à la crise, à des secousses industrielles sans précédent 2. Emparez-vous sans tarder de votre loi de puissance créative, c’est une question de survie.
3 générations d’outils d’IA, l’actif intangible dévore l’immobilier si tangible
Commençons par le monde tangible. On l’oublie souvent, mais la première classe d’actif au monde, la première richesse mondiale donc (environ 50% en valeur) reste l’actif immobilier (villes, immobilier,…). Mais si vous regardez ce graphique des actifs cotés au S&P 500, vous voyez que depuis 1975, la valeur de l’actif intangible, par exemple technologique - que l’IA domine aujourd’hui, ne cesse de progresser. On sait à quel point la valeur de cet actif intangible est volatile. Mon hypothèse est même que cet actif intangible pourrait dévorer, au sens propre et au sens figuré, l’actif tangible et sa valeur. Et si la règle du showbiz s’imposait au monde ?
La dynamique est en réalité plus complexe, nous allons voir comment les actifs intangibles, aujourd’hui propulsés par 3 générations d’outils d’IA qui codent et progressent à une échelle hyper exponentielle, pénètrent au cœur de la valeur des actifs les plus tangibles.
Il faut prendre conscience de la vitesse inédite, proprement vertigineuse de l’échelle hyper-exponentielle de l’IA. Et comme l’âge de l’IA commence à peine à décoller en 2025, ceci va produire des effets aussi imprévisibles que bizarres dans la décennie. Pour y voir plus clair, examinons d’abord ces 3 générations imbriquées d’outils d’IA (ex: OpenAI/ChatGPT). Les 15 premiers outils sont (quasiment) tous américains. L’un est chinois (Deepseek). L’un n’est plus vraiment français, Mistral. Il faut comprendre que ces outils engloutissent chacun entre 1 et jusqu’à 100 milliards pour concevoir et produire ces 3 générations d’outils depuis 2018. C’est plus que le budget de la moitié des états dans le monde.
La première génération d’outils l’IA est celle des grands modèles de langages, les LLM (Large Language Models. Ces outils répondent à toutes vos questions, ils peuvent halluciner, mais leur profondeur d’analyse est supérieure à l’humain, car ils sont entrainés sur (presque) tout ce qui a été écrit depuis Gutenberg. Nul doute qu’ils peuvent aider une classe créative (un cinéaste, un architecte, …)
La seconde génération d’outil est celle des agents de raisonnement comme OpenAI o1/o2/o3 (2024). Elle est construite sur une combinaison technologique de multiples LLMs qui dialoguent entre eux, ils vous montrent leur flux de raisonnement et leurs conclusions. Il est clair que la classe créative peut en faire usage pour renforcer en continu ses 7 pouvoirs créatifs dans son cycle de progression (voir la loi de puissance créative et son cycle plus bas).
La troisième génération d’outil d’IA est dite agentique, car elle combine à nouveau les 2 premières, et elle agit à une échelle très puissante. Elle peut programmer une application mobile, un site web, elle peut écrire dans une base de données, elle peut poser des questions et orchestrer les actions d’autres agents qui raisonnent dynamiquement (en mémoire). Dit autrement, ces milliards d’agents d’IA vont devenir des actifs intangibles de plus en plus puissants.
La décentralisation technologique affole la valeur des actifs
Si ces outils analysent, raisonnent, et agissent à la vitesse de la lumière, jusqu’où pourra aller une classe créative qui saura d’abord protéger son cerveau, son actif le plus précieux ? Celle qui saura d’abord cultiver sa lecture du livre (son imagination), celle qui saura d’abord développer son écriture et son dessin (sa créativité, pensez au dessin d’architecte). Dit autrement, j’argumente comment l’individu créatif peut aujourd’hui sublimer sa valeur en s’emparant du Livre, de l’écriture, du dessin et de l’IA, dans cet ordre vital. Un exemple ? Pour bien « prompter », bien commander un outil d’IA, il est indispensable d’avoir de l’imagination et de savoir (vraiment) bien décrire et écrire ce qu’on veut. Plus votre question sera imaginative, précise et bien rédigée, plus la réponse de votre outil vous permettra de progresser en franchissant des seuils. Alors, l’IA vous permettra d’élever le niveau de votre imagination et de votre abstraction, ce qui est vital dans ce monde imprévisible.
J’argumente, avec ma recherche sur la loi de puissance créative, que cette formidable décentralisation technologique des outils d’IA donne à un individu SEUL le pouvoir de réaliser un projet qui avant nécessitait (environ) entre 20 et jusqu’à 200 fois plus de ressources humaine ou financière. Il s’agit d’une révolution du travail et de sa valeur. On comprend ici que l’âge de l’IA entraine une compression vertigineuse à la fois de l’espace géographique (celui de l’architecte, celui du cinéaste, …), mais aussi du temps et des ressources nécessaires pour créer un actif, et que cette propriété intellectuelle sera radicalement différente de celle du monde d’avant. L’auteur-architecte-cinéaste peut distribuer son actif lui-même vers une audience qui, en grandissant, augmente sa valeur en retour. Il peut en augmenter la valeur, voir même la sublimer à l’échelle (voir cycle de réinvention plus bas). On change brutalement de monde, mais pas nécessairement vers celui du profit toujours croissant de l’industrie. L’imprévisibilité totale de la valeur des actifs n’est pas le monde que l’industriel préfère, je prend même le pari que la règle de Goldman va l'empêcher de dormir. Je ne suis même pas certain qu’il la comprenne un jour, tant elle lui fait perdre de pouvoir.
Les actifs intangibles pénètrent au cœur des actifs tangibles: des filières industrielles ébranlées
Revenons à l’histoire industrielle pour comprendre ce qui va se passer avec l’IA. Depuis 1900, on sait à quel point la révolution industrielle de l’automobile a forcé des générations d’architecte à repenser du sol au plafond nos routes, nos villes, nos bureaux, nos usines - pour le meilleur et pour le pire: songez aux 45 millions de m2 de bureaux gris du Grand Paris, La Défense étant le pompon du béton ennuyeux (je l’ai bien connu).
Examinons ce qui se passe avec les actifs les plus tangibles sur 2025-2035:
L’actif de nos routes physiques, repensées avec internet, devient le royaume cloisonné des géants de la tech. Fragmentation politique ?
J’estime qu’en 2025, un milliard d’agent d’IA, des actifs numériques terriblement agissants, vont pénétrer au coeur de nos routes numériques (internet est devenu l’espace de discussion, où plutôt de la colère politique tout azimut). Il s’agit d’un premier exemple d’actif intangible qui pénètre au coeur d’un actif tangiblement goudronné, nos routes autrefois physiques. Les principaux actifs de nos routes numériques sont ceux des géants de l’oligarchie, les Musk, Zuckerberg, Google, Amazon, Apple, … Ces géants nous imposent leurs règles algorithmiques de l’IA, celles de la colère et de la rage, celles de la surveillance de nos propres entreprises, car elle rapporte bien plus. Ne cherchez pas plus loin les raisons de la fragmentation politique croissante, du pourrissement du cerveau de l’enfant et de l’adulte, de la désinformation de masse (lisez ici mon analyse sur ce sujet). Mais il y a un espoir: notre loi de puissance créative est disponible, elle est vitale !
L’actif de nos voitures réinventées par l’IA, l’Allemagne industrielle ébranlée
On sait avec Tesla que les milliards d’agents de l’IA de Musk (ex: Grok) pénètrent au coeur de la valeur de l’actif automobile électrique qui vous conduit là où Musk le décide, il s’arroge le contrôle de votre cerveau. Les constructeurs chinois nous fournissent une démonstration éclatante de ce phénomène, car ils ont eu la force industrielle de repenser totalement leur processus de fabrication autour de l’IA: on peut dire qu’ils ont compris le pouvoir de leur loi de puissance, celle qui menace les USA. L’Europe a environ dix ans de retard. Conséquence: les actifs industriels automobiles européens, autrefois parmi les plus surs, deviennent de plus en plus volatils. Pensez à l’économie allemande qui vacille depuis 2 ans. La stabilité, vertu autrefois cardinale outre-Rhin, n’est plus ce qu’elle était. La récession ébranle depuis deux ans la première économie du continent européen et ses filières industrielles.
La géo-allocation optimisée du travail créatif fait s’effondrer la valeur de l’actif du bureau, entrainant la filière industrielle de l’immobilier dans un engrenage de crise
Comme je l’ai analysé dans ma lettre précédente, la loi de puissance de l’individu, la nouvelle façon de travailler de la classe créative est un actif intangible et un nouveau pouvoir redoutable, au sens qu’il permet à chacun de répartir, de distribuer dynamiquement des projets (de film, d’architecture,…) de ville en ville. Bienvenue dans la géo-allocation du travail, regardez bien les pouvoir No 2 (décentralisation technologique) et No 4 (géo-allocation optimisée) au centre du cycle de réinvention:
L’entreprise est mortelle, les villes sont immortelles… si elles s’adaptent à la règle du showbiz
« Les villes sont immortelles car elles attirent et accueillent depuis toujours un classe créative, celle des marginaux, celle des excentriques pleins d’imagination. L’ industrie et l’entreprise sont toujours plus mortelles car elles font précisément l’inverse » – Brian West, un grand théoricien de la ville
Sur 2025-2035, on a vu comment, , le travail créatif se réinvente à toute allure avec une classe imaginative qui peut choisir sa ville (un actif tangible)… mais sur des critères et des règles radicalement différentes de celles du monde d’avant: la règle du showbiz ! Les conséquences économiques et sociétales seront aussi phénoménales qu’inédites. Voici les 3 conséquences principales, je recommande vivement aux jeunes architectes d’y réfléchir:
D’abord, la valeur de l’actif urbain du bureau, autrefois si stable et si bien rempli par le pouvoir autoritaire de l’entreprise (contrat de travail), la valeur par exemple des 45 millions de m2 de bureau du Grand Paris, est en chute libre. La valeur de cette masse de bureaux gris devenus si ennuyeux, ce repoussoir absolu pour la dite-classe créative, est même négative avec un taux d’occupation qui ne remonte pas dessus de 50%. Ainsi, dans les dix ans qui viennent, c’est toute la filière industrielle de l’immobilier qui va se retrouver ballottée par des nouvelles règles de la valeur, celles d’Hollywood. Les comprend-t-elle ? Il me semble que non, il s’agira alors d’un engrenage industriel infernal, un piège inédit.
Ensuite, les villes se retrouvent en concurrence exacerbées les unes avec les autres, un phénomène totalement inédit dans l’histoire de leur attractivité, de leur valeur. Depuis 5000 ans, l’homme a toujours choisit sa ville d’abord pour les emplois qu’elle procurait. Ce n’est plus vrai pour la classe créative, il s’agit d’une rupture anthropologique et technologique qu’il vaut mieux ne pas sous-estimer.
Enfin, cette rupture anthropologique change radicalement les règles d’attractivité des entreprises qui recherchent des talents… tout en les repoussant avec leur bureaux ennuyeux ou en leur faisant la guerre avec l’IA. Je pense comme West, l’entreprise est plus que jamais mortelle, car c’est une institution de conformisme par excellence; comprend-elle ces nouvelles règles de l’imagination des créateurs ? Je n’ai jamais été frappé par l’imagination d’une grande entreprise, et vous ?
Personnellement, je comprends la classe créative. Ne mène-t-elle un combat de légitime défense, un combat de survie ?
Dans ce monde d’imprévisibilité totale, quoi de plus important que de renforcer la valeur de votre imagination ? Quoi de plus essentiel que d’augmenter la valeur (indépassable) que vous procure le Livre, l’écriture, le dessin, et l’IA (dans cet ordre!) ? Quoi de plus important que de saisir (enfin!) 100% de la valeur de vos actifs, celle de votre Propriété Intellectuelle radicalement différente ? N’oubliez jamais ceci: si votre imagination n’a pas de limites, vous pouvez même sublimer votre valeur; et vivre (enfin!) dignement de vos œuvres.
Qu’en pensez-vous ? Merci de réagir ici avec votre commentaire ?
David Jamet - david@livre-contre-ia.fr