L’engrenage infernal du cinéma, ou l'autre IA humaniste ? (#3)
Et autres tendances, profondes et chaotiques, affectant la culture et l'espace public. À quoi tient l'intelligence créative des 5 technologies du langage depuis l'origine de l'homme (Homo Sapiens) ?
J’aime le cinéma, la culture et ses créateurs, et je me désole de voir dans quel engrenage infernal, dans quel piège ils sont tombés aux USA, et je crains tôt ou tard en France. Comment la spirale d’intelligence créative du langage humain, ayant fait ses preuves depuis l’origine de notre espèce (Homo Sapiens), a-t-elle pu se transformer avec internet et l’IA en cet engrenage mortel pour la culture et l’avenir des plus jeunes ? J’argumente aujourd’hui pourquoi ils trop souvent soumis à l’addiction, et donc à l’ignorance, à travers cette spirale infernale et sa boucle de dopamine1.
Ne faut-il pas s’inquiéter de cette société de drogués que nous prépare le système industriel utilisant l’IA à une échelle insoutenable (le cinéma en fait partie aux USA), qui nous impose son “Voyage au bout de l’enfer”, sachant que cet impact techno-sociétal de l’IA ne fait que commencer ? En 1978 déjà, dans son opus du même nom, Micheal Cimino2 racontait la descente aux enfers imposée par la guerre technologique du Vietnam et les drogues de l’époque (1955-1975). J’ai aimé ce film, je vous propose d’y repenser aujourd’hui en vous redonnant l’espoir:

Mes lettres sont des cartes postales, des enquêtes scientifiques, indépendantes, sur les effets systémiques, culturels et politiques, des 5 technologies du langage depuis 300 000 ans (Homo Sapiens) 1- Langage d’imagination symbolique (spirale d’intelligence) 2- Langage lu et écrit au service du pouvoir (lois, macro culture) 3- Diffusion du langage littéraire par le livre (1450, Gutenberg), 4- Macro culture industrielle (19ième/20ième, médias de masse) 5- Macro culture de dopamine des IAs à 100 Md$ induisant une guerre totale contre l’intelligence et la culture. Mes enquêtes dévoilent cette autre IA humaniste, fondée sur une autre propriété intellectuelle (cf spirale d’intelligence) qui apporte (enfin !) l’autonomie financière aux créateurs: l’autre IA, ça paye ! Merci de soutenir mes lettres en les partageant 👇 ?
Engrenage infernal, culture de dopamine
« Le cerveau et la technologie (de surveillance, NDLA) sont les champs de bataille au cœur de la géopolitique du XXIème siècle » James Giordano (2018), Professeur de neurosciences et de bioéthique à Georgetown, Washington, USA
En 1996, Paul Virilio3 théorise la dualité, la tension entre les pulsions de vie ou de mort inhérentes à chaque technologie du langage comme internet, son hyper-vitesse et son langage artificiel (IA). En 2002, Laurence Lessig4 montre dans un article célèbre comment “l’algorithme fait la loi” (du langage, de la conversation, du débat…), devenant une menace irrésistible pour nos libertés dans le cyberespace; doit-on en déduire que l’IA va nous imposer sa loi du langage, qui, devenant totalement artificiel, s’imposera à tous et à tout instant pour abrutir nos esprits sens propre, et ce à une échelle inédite ? Si l’IA fait passer le cinéma, la musique, les médias et les journalistes (entre autres) à une échelle industrielle totale (et sans saveur), générant demain l’essentiel des contenus “chaotiques” pour énerver et inquiéter (pour le profit), quelles sont les conséquences pour la société, pour la culture, pour l’espace public ? Quelle est la “seconde’ loi biologique du langage qui explique pourquoi l’hyper-vitesse de l’IA, ce langage artificiel, est proprement insoutenable pour nos cerveaux de Sapiens, et donc pour nos conversations (débats) démocratiques ? Comment résister, qui en a le pouvoir, et pourquoi cet enfer du cinéma est-il paradoxalement, un véritable “paradis” pour les créateurs de demain qui sauront utiliser l’IA autrement ? Et d’abord pourquoi cette “autre IA” est-elle possible ? Pourquoi devient-il urgent d’améliorer nos sens, notre imagination, nos capacités créatives humaines enfouies en nous, plutôt que de vouloir remplacer tous les créateurs comme la plupart de nos PDGs de dopamine en rêvent ?
Pour tenter de comprendre ces tendances dans le temps long, pour décrypter ces évolutions techno-sociétales inquiétantes du langage, il faut d’abord revenir en 2001, et ensuite explorer la genèse même du langage. En 2001, les USA votent le “Patriot Act” qui leur permet de surveiller la vie privée de la terre entière sur internet, ceci étant la cause racine de l’algorithme de dopamine et de l’addiction programmée (et non l’inverse). Il s’agit d’un changement d’échelle, un changement de paradigme du langage (débats, conversations,…) échangé instantanément sur internet qui déstabilise en profondeur l’espace public; le sanctuaire de notre vie privée (l’espace privé du foyer) est pillé à tout instant. L’espace créatif est aussi affaiblit: pour qu’une technologie indiscutablement totale, qui contrôle nos pensées à tout instant, se transforme en outils d’IA ubiquitaires à visée totalitaire, il n’y a qu’un pas; il est déjà franchit depuis longtemps en Chine, et nous devons nous en inquiéter. Alors, accrochez vos ceintures: ce nouveau paradigme est en réalité un cycle infernal qui nous fait rentrer dans une longue période de turbulences qui ne font que commencer: le système industriel du cinéma américain et ses dirigeants traverse une crise inédite qui a éclaté en 2023, et que ses PDGs dans le déni, ne comprennent pas. Elle ne peut que s’aggraver dans une '“spirale infernale” d’abord aux USA et demain en France et ailleurs si rien n’est fait.
Avec l’appui des sciences cognitives, je montre pourquoi un système industriel qui développe l’IA (surtout américain) et qui l’utilise massivement pour son profit (aux USA et bientôt en France dans les industries culturelles) doit être tenu responsable de l’essor d’une pandémie d’addiction aux écrans et des maladies mentales induites; ceci enclenche un engrenage infernal affaiblissant l’intelligence et la culture de génération en génération, lui même reposant sur cette “boucle de dopamine”:
Avec l’essor mondial du smartphone vers 2010, les dirigeants du cinéma, de la musique, des plateformes américaines ou chinoises (Netflix, Dysney, Universal, Facebook-Whatsapp, Google, Microsoft, Tik-tok, …), ont optés pour une stratégie internet de surveillance pour plus d’argent. Ces PDGs militarisent l’espace public et politique préempté par les médias sociaux, ce qui fracture la société et la culture; ils manipulent la créateurs sincères avec de l’IA ad nauseam (à l’échelle) pour in fine les éliminer pour le profit: pas de droits d’auteurs ni de salaire à payer. Songez que pour développer un produit d’IA compétitif, c’est à dire américain aujourd’hui, on aura besoin en 2025 de… 100 milliards de dollars de capital risque, un budget supérieur au PIB de plus des deux tiers des pays dans le monde. Il va s’agir de surveiller, de remplacer, et d’abrutir des humains - et d’abord des enfants - par millions pour justifier un tel investissement. Nos PDGs ne sont pas en reste: ils génèrent de faux acteurs insipides avec de l’IA, ou fabriquent des chanteurs artificiels qui pullulent aujourd’hui sur youtube, spotify, ou tik-tok (zéro droit d’auteur à payer). Il faut prendre conscience ici que les formules et les contenus répétitifs devenant mortellement ennuyeux remontent à loin: la première formule (saison) de “Mission impossible” date de 1966, et avec les 7 films de Tom Cruise, l’as de la scientologie qui vient de fondre sur le JO de Paris et demain de LA 2028, la véritable mission impossible serait de revenir à une industrie cinématographique originale et soucieuse d’investir autant sur les nouveaux talents que sur les anciens. Car enfin, 62 ans de répétition ((2028-1966) de la formule éculée de “Mission impossible”, n’est-ce pas un peu trop ? Et une fois encore, ce n’est pas tant la durée qui pose un problème, c’est le changement d’échelle: l’industrie nous gave ad nauseam de ses formules algorithmiques satanisées, sans âme, sans originalité.
Ces séries de formules pré-fabriquées, cette production de films qui démultiplie les reboot-sequel-prequel de Star Wars №№XY ou de Marvels № ZT, ont finit en 2023 par faire s’effondrer la foule des spectateurs (voir plus bas ma première analyse chiffrée). Rien d’étonnant: une partie grandissante de l’humanité scrolle toujours plus sur son smartphone, cette bombe de distraction et d’addiction qui isole (provoquant des troubles de l’empathie inédits, souvent irréparables), qui laisse un cerveau fragile en friche (ignorance et inégalités galopantes,… ). Les dirigeants utilisent l’IA pour inonder nos cervelles de dopamine afin qu’on consomme leurs contenus d’IA sans limites - un vocable terrifiant quand on y songe une seconde. Est-ce qu’un contenu a besoin d’être original, créatif ? Non, il doit juste être un piège à clic pour un cerveau fragile de zombie. Nos PDGs nous fabriquent une société fracturée, spectrale, fantomatique, peuplée de morts vivants qui obéissent à leurs algorithmes.
Pourtant, en écrivant cette lettre, je me souviens d’avoir été bouleversé en 1978 par le premier film traitant du trauma vécu par les héros du film “Voyage au bout de l’enfer”: Micheal Cimino fut le premier cinéaste à oser aborder la spirale infernale de la guerre du Vietnam (1955-1975) et de l’impact de la drogue sur la société américaine. J’aime ce pays à qui je dois beaucoup, pour y avoir commencé à travailler il y a longtemps comme jeune ingénieur sur l’internet opensource qui prenait son essor et sur une IA à l’époque utopique. J’ai aussi aimé la technologie qui a occupé une bonne part de ma vie, mais j’ai appris à m’en méfier surtout depuis 2016 (Trump). Je ne suis pas contre l’IA par principe, nous verrons qu’elle peut servir à de vrais créateurs audacieux. Mais je me désole de voir dans quelle spirale infernale nous conduit le système capitaliste américain de dopamine; je suis désillusionné par une macro institution européenne qui, perdant sa souveraineté technologique et culturelle, perd son âme. Mais la bataille n’est pas perdue !
“Dealers maximo”: agents du chaos
Il est temps d’analyser la descente aux enfers culturelle que le système industriel nous préparent en réalité depuis 2001. Depuis bientôt un quart de siècle, ses dirigeants s’entêtent à surveiller la société avec une hargne grandissante qui est à la hauteur de leur appât du gain: il n’a pas de limites. Connaissez-vous la définition de leur insanité selon Einstein ?
Nos chers dirigeants - car leur salaire ne fait qu’augmenter, prennent très au sérieux leur mission de “Leader maximo”, que dis-je de “Dealer maximo5” puisqu’ils nous fabriquent une société de drogués dont ils sont les misérables chefaillons.
Mais nous allons le voir, ils sont pris au piège du cercle vicieux qu’ils ont eux même concoctés, car ils sont dans le déni d’un autre changement de paradigme qu’ils ne pourront jamais comprendre. C’est pour cela que la rébellion de l’artiste au sens large contre ces PDGs sans conscience pourra être aussi subtile qu’efficace, aussi déstabilisante pour leur système toxique. Car enfin, connaissez-vous un système capitalistique plus guerrier, une industrie soit disant culturelle plus dangereuse pour nos libertés ? Quels sont ces producteurs qui avec leurs formules de contenus ad nauseam privilégient le vieux contre le nouveau créatif, la copie à l’original ? Quel est ce système économique de surveillance industrielle qui sacrifie “… pour quelques dollars de plus6”, l’avenir des créateurs auxquels il doit tout depuis 120 ans, depuis la naissance même de l’industrie du cinéma et de la musique ? Ses dirigeants ne sont-ils pas des sociopathes, des agents du chaos digital auquel, convenons-en, nous contribuons chacun un peu chaque jour avec trop d’écrans ?
Car notre cerveau créatif ancestral, d’origine “paléolithique” même, peut se rebeller avec raffinement. In se trouve que nos chers PDGs s’infligent un long et douloureux hara-kiri, ils se coupent lentement des créateurs et des spectateurs avec leurs “formules” obsolètes; en 2023, ils constatent effarés que leurs revenus et la production de films chute de façon vertigineuse par rapport aux sommets d’il y a quelques années. Et ils n’ont pas la moindre idées pour s’en sortir: une spirale infernale, vous dis-je…
J’analyserai plus en détail dans les prochaines lettres pourquoi c’est en réalité tout l’écosystème du divertissement au sens large qui est déstabilisé pour longtemps. Retenez cette anticipation: cela ira plus mal avant d’aller mieux, car nous n’en sommes qu’au début des effets chaotiques l’IA sur la société. Attachez vos ceintures, nous rentrons dans une période de turbulences violentes, un trauma psychologique d’une ampleur inédite. Dans les lettres suivantes, nous verrons pourquoi la catabase de l’IA, comparable au mythe de la descente d’Orphée aux enfers, n’est pas du tout un mythe, alors que son nom commercial (“Intelligence artificielle”) en est un !
On est loin, très loin de la fin du piège de l’IA. Elle sera aussi, parfois mais rarement, une technologie utile mais toujours inégalitaire; les vrais créateurs qui savent nourrir leurs idées et se rebeller contre la surveillance vont tirer leur épingle du jeu avec une subtilité à échelle humaine que nous explorerons. Car l’IA est entrainée avec 100% de notre vie privée surveillée à chaque instant. Croyez-moi, ces produits ne font que recracher statistiquement la culture passée, ils ne seront jamais ni intelligents ni créatifs de rien au sens humain du terme. Cette lettre approfondira ces questions qui resteront au cœur de nos sociétés. L’industrie, la macro culture et ses institutions sont déstabilisées pour longtemps. Les résultats 2023 du cinéma s’effondrent, lisez ici l’analyse chiffrée de Ted Gioia “The Movie Business is Over” . Mais la micro culture, celle des vrais gens et des artistes indépendants restera vibrante et j’anticipe qu’elle va se rebeller contre ces PDGs sans conscience: c’est le cœur battant et l’avenir de l’homme, c’est la culture qui nous unit.
Une autre IA est possible, que les créateurs se rebellent !
Dans mon essai7, je fait le récit de l’origine, de la genèse du langage créatif d’Homo Sapiens allant jusqu’au langage artificiel (IA); j’invite en conclusion les créateurs indépendants à faire preuve de leur sens de la rébellion face à cette spirale infernale de l’IA. Cette lettre poursuit la recherche de mon essai en développant ce que sera cette autre IA écologique des créateurs indépendants que j’observe déjà aux USA; je proposerai ma méthode originale, une démarche d’autonomie financière pour se passer d’un système industriel dit de “dopamine” quand il sape la culture. Cet autre IA repose sur deux principes qui s’articulent, l’un simple à exprimer, l’autre plus complexe:
Le premier principe est que que notre imagination, notre intelligence créative, est sans limite à condition de l’éveiller, de la développer, de la reconquérir parfois, et avec une méthode que je résume ici: “Par le livre seul” (Luther). Le livre reste notre outil d’intelligence indépassable, surtout à l’âge de l’IA, alors pourquoi alors dépenser ces centaines de milliards à développer un système industriel d’intelligence artificiel alors que nous en avons tant qui sommeille en nous ? Ne faut-il pas cesser de construire ces usines de “sable soit-disant intelligent” en plein milieu de l’inépuisable Sahara de notre esprit de Sapiens ?
Le second principe complexe s’appelle l’ingénierie inverse des 5 grandes adaptations langagières qui ont forgées la culture humaine et que nous découvrirons dans la prochaine lettre #4 ?
David Jamet - david@livre-contre-ia.fr
Qu’en pensez-vous, si cette lettre vous intéresse, merci de laisser un commentaire ?
La dopamine, générée par tout algorithme d’IA, repose sur la surveillance quasi-totale de nos vies privées: on doit la voir comme l’hormone qui engendre l’addiction aux écrans dans une boucle de dopamine décrite dans cette lettre. Avec les sciences cognitives, je montre comment un système industriel qui développe et utilise l’IA pour son profit doit être tenu responsable de l’essor d’une pandémie d’addiction aux écrans et des maladies mentales induites. L’IA est ainsi, à l’échelle d’internet, la technologie langagière d’hyper-vitesse la plus inégalitaire jamais inventée, interdisant l’accès égal à la connaissance; elle polarise la société, créant le chaos dans le débat public, dans l’esprit public.
“Voyage au bout de l’enfer” (1978) est le premier film américain traitant de la guerre du Vietnam et de la drogue, ainsi que des traumatismes et des impacts psychologiques profonds qu’elles eurent sur la société. Cimino adopte un point de vue critique sur cette guerre; ce film est une allégorie explosive qui explique l’horreur, le hasard, la folie, l’instinct de survie.
Paul Virilio (1932-2018) est un philosophe connu pour ses écrits sur la technologie et l’hyper vitesse dont l’alliance constitue une « dromosphère »: “Cybermonde, la politique du pire” (1996).
Laurence Lessig, un juriste spécialisé dans le cyberspace écrit en 2000 ce fameux article que vous pouvez lire ici: “Le code fait loi”– De la liberté dans le cyberespace”.
Fidel Castro (1926-2016), révolutionnaire puis dictateur cubain de 1959 à 2008, était surnommé le “Leader Maximo”. Depuis 2001, les PDGs sans conscience d’un cinéma de dopamine sont donc devenus des “Dealers Maximo”.
“… Et pour quelques dollars de plus” est le deuxième volet de la trilogie mythique du dollar du Sergio Leone, qui comprend également “Pour une poignée de dollars” et “Le Bon, la Brute et le Truand (1966)”. C’est aussi une satire féroce de la Ruée vers l’Ouest de la société américaine.