Les dix chaos de l'IA: voyage au cœur d'un nouveau fascisme. Libérez (d'urgence) vos pouvoirs de l'écriture (#1)
Une série d'anticipation, 10 épisodes au cœur de l'actualité. Quand nos institutions et nos lois si stables volent en éclats. Voyagez dans le modèle créatif et les pouvoirs secrets des grands auteurs.
D’un fascisme à l’autre
“Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges mais que plus personne ne croit plus à rien. (guerre des mots aujourd’hui avec l’IA, ndla). Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion […] Avec un tel peuple, vous pouvez faire ce que vous voulez” Annah Arendt, La condition de l’homme moderne, 1958
J’étudie le modèle d’écriture créative des plus grands auteurs; j’ai choisi Montaigne, Zweig et Arendt pour illustrer aujourd’hui en quoi les pouvoirs secrets de ce modèle nous permettent de combattre les chaos de l’IA. J’ai, comme vous je suppose mes préférences culturelles et politiques. Arendt en fait partie, elle a fuit l’Allemagne nazie, et a passé sa vie à tenter de comprendre la pire barbarie de notre histoire.
Je viens de relire Zweig et son “Montaigne” qu’il a écrit en 1941, alors que son “Monde d’hier1” s’écroulait; il lutte alors avec sa plume, un an avant son suicide (1942) car il est lui aussi traqué par le fascisme. Montaigne, lui, a vécu les guerres de religions - une autre forme de barbarie, et la puissance de ses “Essais” va redonner à Zweig la force de livrer son dernier combat d’écrivain.
Je veux lutter moi aussi, avec ma petite plume de chercheur, contre l’essor du nouveau fascisme de l’IA, car nous n’en sommes qu’au tout début de son essor. J’étudie les trois grandes révolutions de l’histoire qui ont eu lieu à trois âges (Sapiens/Gutenberg/IA), alors que les trois langages de l’homme sont passés à l’échelle du monde. On devine pourquoi, avec l’échelle exponentielle de l’IA, nous sommes rentrés brutalement dans ce monde d’imprévisibilité totale.
Accrochez-vos ceintures, voici les dix grandes questions d’une actualité brulante auxquelles cette série tente de répondre. Avec ma recherche, j’étudie les causes premières de ces dix chaos de l’histoire. Ne les sous-estimez surtout pas: j’affirme que depuis 5000 ans, depuis que l’écriture et les villes existent, on n’a jamais vu de telles forces transformer le monde.
On a vu à quel point la guerre des mots, celle de l’IA, nous manipule. On voit moins, car il faut avoir le recul de l’histoire, que les conflits se multiplient et s’accélèrent. Ce sont à la fois l’échelle exponentielle de l’IA et les guerres technologiques induites qui rendent le temps et l’espace non-linéaires, chaotiques.
D’une part, cette technologie redoutable prend en étau toutes les industries, qu’elles le veuille ou non (voir plus bas). L’incertitude généralisée, la volatilité totale des actifs, est leur pire ennemi. D’autre part, l’IA remet en cause en profondeur tous les métiers et la valeur du travail, ce qui est une opportunité inédite pour les esprits à l’écriture aiguisée. L’ironie de l’histoire est que ceux-la même qui n’ont aucun besoin de l’IA, parce qu’ils savent écrire de façon ciselée, vont en profiter le plus. Ni vous ni moi ne savons ce qu’ils vont produire, une seule chose est certaine: leur valeur sera bondissante à l’échelle.
L’IA frappe nos plus grandes institutions et fait éclater les lois. Voici les dix grands chaos que je traiterai successivement dans chaque épisode (#1 à #10):
Voyage au cœur d’un technofascisme sur stéroïdes. Quels sont les dix chaos, lesquels combattre ? Comment saisir leurs opportunités avec ce modèle d’écriture qui a traversé l’histoire (#1) Pourquoi des industries entières ne peuvent pas résister à la surveillance technologique généralisée à une échelle devenue folle - le premier trait d’un pouvoir totalitaire ? Montaigne et Zweig nous donnent la plus belle leçon de résistance: découvrez les pouvoirs secrets de leur plume réflexive !
L’enfer des industries culturelles: quand les lois du capitalisme volent en éclat, c’est la révolution. Qui perd et qui gagne ? (#2, #3, #4 #5). La tragédie des PDGs du monde d’avant est que la valeur du travail n’est plus linéaire. La nouvelle loi de la valeur créative (cf modèle des grands auteurs dévoilé dans cette série) permet à toute personne à l’esprit aiguisé d’augmenter ses pouvoirs et sa valeur à l’échelle de l’IA. Il s’agit ni plus ni moins d’une révolution, la troisième de l’histoire de l’art. Il s’agit d’une immense opportunité pour les auteurs qui combattent. Leur valeur et leur propriété intellectuelle la plus intime leur appartient (enfin!) à 100%. Leur trésor est (enfin!) inaliénable. Mais l’ironie de l’histoire est que cette révolution ne profite qu’à ceux… qui n’ont pas besoin de l’IA car ils ont déjà une riche imagination de lecteur et une écriture ciselée. Nous découvrirons successivement le cercle vicieux des grands médias, puis celui de l’édition monopolistique qui écrase les auteurs. Enfin celui du cinéma industriel qui n’a plus rien de créatif: il traverse déjà son “Voyage au bout de l’enfer”. Quand à la lavasse de musique générée par les plateformes d’IA, elles ne paie plus rien aux auteurs, elles les éradiquent. Ces industries brûlent les créateurs et leurs œuvres avec leur IA prédatrice. Bruler les livres, cela ne vous rappelle rien ?
L’État de droit n’a plus lieu d’être, le technofascisme explose, comment combattre ? (#6, #7). Trump et Poutine exultent en s’emparant de la guerre des mots. Arendt nous avait prévenu: quand on ment comme on respire, quand on brûle les livres, quand on éradique les chercheurs, on peut faire ce qu’on veut avec un peuple. Sauf si les individus se rebellent, et je vous invite à combattre avec ces “vivants piliers” comme Zweig et Montaigne. Ils vivent en nous, ils nous donne une vitalité à laquelle rien ne résiste.
L’allié américain n’est plus fiable, notre sécurité n’est plus assurée, l’État-providence est en faillite. Après Pax Americana, quelle est cette War Americana ? Comment résister ? (#8).
L’École, l’Université refusent de se remettre en cause (#9, #10) Chacune piégée aussi dans un engrenage infernal. Et si une classe créative les forçait à se repenser en profondeur ?.
Le piège de l’IA nous rend-il tous débile ?
L’histoire troublante, que dis-je, la faillite cognitive qui fait aujourd'hui la une des médias américains est “Tout le monde triche à l’Université”. Comment font-ils ? C’est simple, avec l’IA prédatrice des géants de la tech. Je vous résume cet article analysé ici par Gary Marcus (Marcus on AI), un scientifique à la pointe du combat contre une IA prédatrice.
Marcus souligne qu’un nombre massif d'étudiants émergent des universités certes avec des diplômes, mais que cette jeunesse est essentiellement analphabète, handicapée dès son arrivée sur le marché du travail. Cette génération se retrouve amoindrie, car ma recherche le prouve: depuis 5000 ans, l’écriture manuscrite, l’écriture créative est l’outil scientifiquement indépassable de progression de l’intelligence humaine. On ne fera jamais mieux: les pouvoirs cognitifs de la plume et de la lecture pour faire progresser nos capacités sont indépassables.
À l’inverse, cette génération est littéralement “empêchée” de s’épanouir dans la vie, car 100% d’écrans d’IA condamnent à coup sûr à l’ignorance. Elle est donc historiquement privée à la fois de la connaissance de sa propre culture, et de celle des autres personnes. Elle ne maîtrise plus ce pouvoir vital pour progresser et s’adapter dans les chaos qui s’annoncent. Je pense sincèrement que je ne souhaiterais pas un tel sort même à mon ennemi.
Mais qui triche dans cette faillite du système éducatif américain ? Ne souriez pas, je pense que le nôtre est aussi frappé. Car on peut aussi défendre qu’il est grand temps que notre système éducatif ait le courage (et les moyens…) de se remettre en cause. Il est absolument nécessaire qu’il repense tous ses curriculums, et tout son système d’accréditation à l’âge de l’IA. Mais ils se retrouve lui aussi pris entre le marteau et l’enclume: de moins en moins de moyens, des défis éducatifs de plus en plus grands, et des professeurs dont le niveau baisse depuis 30 ans. L’école est aussi prise dans le même étau asphyxiant, avec une baisse des capacités de lecture et d’écriture des enfants qui remonte au premier ordinateur (1980). Lisez ici l’essai fouillé, “La fabrique du crétin digital” de Michel Desmurget. Et il l’a écrit avant l’explosion de l’IA générative… Les premiers perdants sont les enfants et les étudiants. Comment résister, sinon en puisant dans les secrets des grands pouvoirs cognitifs de l’écriture qui ont traversé l’histoire ?
Le dernier combat de Zweig: Montaigne est sa boussole, son grand référent
En 1941, les nazis font faire ce qu’ils veulent - l’holocauste - au peuple allemand (cf Arendt). Zweig explore une dernière fois les pouvoirs secrets - des pouvoirs réflexifs ( effet miroir), de ce modèle d’écriture. Cette force de l’écriture qui seule permet de mieux se connaître soi-même, de protéger sa liberté et sa valeur coûte que coûte. Il prend deux décisions radicales.
D’abord, comme Montaigne fuyant la Peste qui décime Bordeaux, il fuit la guerre et les nazis dans le lointain Brésil. Ensuite, il relit tout Montaigne, et en écrivant son chef-d’œuvre, il comprend le pouvoir secret de son grand référent. Cet immense auteur des “Essais” a atteint, quelques siècles avant lui, un premier sommet de cet art réflexif si vital de parvenir à se penser soi-même.
Je vous montrerai d’épisode en épisode ce que Zweig, avec son “Montaigne”, ce que Balzac avec son “Louis Lambert”, ou ce que Klee avec son “Mouvement autour d’un enfant” (lisez ici) ont en commun: ce même modèle créatif d’écriture ou de dessin qui traverse l’histoire de l’art. Chaque auteur, à sa façon, a poussé à l’extrême, à l’échelle technologique du langage, les pouvoirs secrets de cet art réflexif le plus intime; et aussi les pouvoirs réflexifs de l’émotion, celle d’une audience grandissante et vibrante qui nourrit l’auteur en retour. Nous tenterons d’éclairer ce mystère épais de l’histoire de l’art: en quoi les plus grands auteurs et créateurs ont-ils en commun de pousser à l’extrême les sept pouvoirs de ce modèle ? Quelles leçons pouvons-nous en tirer aujourd’hui pour démultiplier notre valeur créative, pour combattre le technofascisme ?
Quel est ce mystère qui traverse la création humaine ?
Le modèle secret des plus grands auteurs
Zweig a témoigné, dans l’écriture de son “Montaigne”, d’avoir enfin compris ce qui fait l’essence réflexive d’un des plus grands penseurs des guerres de religions du 16e siècle. Ce dernier a travaillé pendant 20 ans (1572-1592) dans sa tour pour écrire ses “Essais”. En écrivant ce magnifique “Montaigne”, Zweig nous donne une leçon de combat éternelle, la plus précieuse des leçons d’écriture pour combattre à l’époque actuelle.
L’immense pouvoir d’émancipation de l’écriture réflexive
“Si Montaigne sort indemne de la prison scolaire de sa jeunesse, c’est parce qu’il a, comme tant d’autres – Balzac l’a si merveilleusement décrit dans ‘Louis Lambert’ –, découvert ce qui, en secret, apporte aide et consolation : le livre de poésie à côté du livre d’école.” Stefan Zweig, “Montaigne”, 1941
La réflexivité – cette capacité à se penser soi-même, à faire de l’expérience vécue un objet de méditation et d’écriture – est au cœur de “Louis Lambert” de Balzac. Ce roman, à la fois biographie intellectuelle et essai philosophique, met en scène un jeune prodige dont la pensée, d’une intensité et d’une puissance rares, finit par le consumer. Balzac y explore les limites du génie, mais aussi la manière dont l’esprit peut se replier sur lui-même pour se protéger, se consoler, se transcender. La réflexivité comme force de survie et d’émancipation. Zweig pointe ici notre capacité universelle: chacun peut s’évader de la contrainte extérieure (l’école, la société, la norme) grâce à la création d’un espace intérieur, nourri par la lecture, la rêverie, la poésie… et l’écriture manuscrite de ses pensées. Chez Balzac, Louis Lambert incarne ce refuge intérieur : il vit « par les seules forces de ces sens intérieurs qui constituent, selon lui, un double être en l’homme ». La réflexivité devient alors un mécanisme de défense, mais aussi de progression intellectuelle, celle de ce modèle créatif : il permet à l’individu de se constituer une citadelle intérieure, de préserver son indépendance face à l’adversité, rejoignant ainsi le combat montanien pour l’indépendance de l’âme. N’en doutez pas: comme le dit si bien Régis Debray, ces grands piliers vivent en nous !
Alors, voulez-vous libérer vos pouvoirs de l’écriture ou du dessin avec ce modèle commun aux grands auteurs ? Abonnez-vous, c’est gratuit. Ou écrivez-moi 👇 si vous voulez participer à mon prochain cours. Au prochain épisode, découvrez les grands auteurs de cette série ?
David Jamet - david@livre-contre-ia.fr
“Le Monde d'hier. Souvenirs d'un Européen” de Stefan Zweig est une autobiographie nostalgique rédigée en 1941 au Brésil, où l'auteur s'est exilé. Ce livre retrace l'Europe d'avant 1914, notamment la Vienne de sa jeunesse, un monde de stabilité, de richesse culturelle et de liberté d'esprit, où Zweig côtoie des figures comme Freud, Rilke et Valéry. Il dépeint un « âge d'or de sécurité » qui s'effondre avec les deux guerres mondiales, l'écroulement des monarchies et la montée des nationalismes. Zweig témoigne de la perte d'une civilisation européenne qu'il chérissait, mêlant destin personnel et tragédie historique